Le rapport juridique

AuthorNicolae Popa
PositionNicolae Titulescu Université, Bucarest
Pages5-13

Dans sa dernière essence, le droit signifie vie, il offre un cadre spécifique à la vie sociale, étant, dans cette lumière, le résultat de la traduction, dans un langage technique, des formes et des structures de la vie sociale1.

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Les premisses du rapport juridique

Pour qu'un rapport juridique puisse apparaître et se déployer, il faut qu'il existe certaines prémisses. En général, on considère que ces prémisses sont: la norme juridique, les sujets de droit et les faits juridiques2. Les premières deux prémisses sont considérées prémisses générales ou abstraites, tandis que le fait juridique est qualifié comme prémisse spéciale ou concrète.

Les normes de droit définissent le domaine du comportement possible ou dû, dans le cadre de certains rapports sociaux sur lesquels l'État a intérêt d'actionner d'une certaine manière. Elles représentent la prémisse fondamentale de la naissance d'un rapport juridique. En effet, faute de normes de droit, on ne peut pas parler de rapport juridique, la norme de droit étant celle qui définit la capacité des sujets de droit, en établissant, en outre, les catégories de faits juridiques de même que leurs effets. En tant que représentation consciente de la classe dirigeante sur le contenu et sur les conséquences de certains rapports entre les hommes, la norme juridique trouve dans le rapport de droit l'incarnation de son principal moyen de réalisation. Pour cette raison, très souvent, le rapport juridique est caractérisé comme une norme juridique en action, son principal, mais non pas son unique moyen de réalisation. L'influence du droit sur les relations sociales ne peut pas être réduite à une seule modalité - c'est à dire à la création et au déploiement des rapports de droit. Elle est

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beaucoup plus complexe. À présent, la grande majorité des spécialistes dans le domaine de la théorie du droit sont d'accord qu'il existe des normes juridiques qui se réalisent même en dehors de la production de rapports juridiques.

Les normes auxquelles on fait référence dans ce cas, sont celles à caractère et contenu prohibitif. La caractéristique de ces normes consiste dans le fait qu'elles défendent et influencent les relations sociales par la méthode d'imposer des abstentions de l'accomplissement de certains faits qui exposent au danger l'ordre de droit. La mission de ces normes, leur tâche fondamentale, n'est donc pas la création des rapports juridiques, mais l'abstention de la commission des faits qui pourraient léser des droits et des intérêts. Dans un tel cas, on ne peut pas soutenir qu'un rapport juridique, fondé sur ces normes, ne pourrait pas se naître ; mais on peut soutenir que des la naissance du rapport juridique contraignant, la mission de la norme juridique prohibitive n'a pas été réalisée. L'apparition du rapport juridique est, dans ce cas, le résultat de la non observation de la norme, de la transgression de l'interdiction. Le législateur a voulu que cette norme soit réalisée non pas par la création du rapport juridique contraignant, mais par l'observation de la conduite prescrite et de l'abstention des actions prohibées.

Dans la droit pénal et administratif on parle, parfois, de l'existence de deux catégories de rapports juridiques: rapports juridiques de conformation et rapports juridiques de conflit.

Le rapport juridique de conformation représente l'adoption de bon gré ou par peur, face à la punition de la conduite prescrite par les normes de droit, tandis que le rapport juridique de contrainte signifie la relation dans laquelle la punition est concrétisée.

A notre avis, il n'est pas possible de s'approprier ce point de vue au moins pour deux raisons:

  1. Raisons de principes. Il nous paraît qu'il ne serait pas opportun d'introduire tous les citoyens dans les rapports juridiques pénaux; 2. Le rapport juridique est une relation sociale concrète, dans laquelle les sujets apparaissent comme porteurs de droits et d'obligations déterminés. L'image d'un rapport juridique abstrait, de conformation, n'apparaît pas d'être la norme juridique elle même. C'est ainsi que la différence entre la norme de droit et le rapport juridique est effacée.

Les normes de droit qui réglementent les soi-disant droits absolus et universels (opposable erga omnes) se réalisent sans créer et déployer directement des rapports juridiques. A ces droits correspond l'obligation générale qui incombe à tous les autres sujets, de s'abstenir des actions qui empêchent leur exercice par les titulaires.

Dans la littérature concernant la théorie du droit a été également souligné le fait que dans les situations déterminées peuvent aussi apparaître des rapport!s de droit faute d'une norme expresse - il s'agit ici du fonctionnement de l'institution de l'analogie (analogis juris).

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Tel qu'on sait, en matière civile, le juge est tenu de se prononcer (Art.3 du Code Civil) même si la loi n'est pas claire ou s'il n'existe pas de réglementation. Dans le cas de l'analogis juris (quand il n'existe pas de possibilité de résoudre l'affaire, et on appelle à l'application d'une norme semblable), le juge fait appel aux principes fondamentaux du droit3. On rencontre rarement l'application du droit fondée sur l'analogie et, en tout cas, elle est limitée au domaine civil.

Indépendamment, l'hypothèse dans laquelle se présenterait le mécanisme complexe de l'influence du droit sur le comportement humain, il faut reconnaître le fait que la forme essentielle de cette influence est constituée par la création et le déploiement de certains rapports juridiques. Les rapports juridiques constituent la plus fréquente modalité par laquelle l'énergie des normes de droit est concrétisée dans la vie sociale. La réalisation du droit par l'intermédiaire des rapports juridiques implique une manifestation explicite de la volonté de certains sujets déterminés, afin de valoriser les prérogatives légales.

Pour cette raison, on considère que la réalisation des normes de droit par l'intermédiaire des rapports juridiques représente l'aspect dynamique de la réglementation juridique. Le caractère typique, général, impersonnel, irréfragable et injonctif de la norme de droit devient particulier, s'individualise, reçoit une forme concrète au sein des rapports juridiques.

Dans l'ensemble des prémisses qui conditionnent le rapport juridique, c'est la norme juridique qui exerce...

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