Certains aspects juridiques concernant la "mère porteuse"

AuthorGabriela Lupsan
PositionMaître De Conférences - Université "Danubius" De Galati
Pages44-57

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I Précisions préalables concernant la filiation résultée de la reproduction médicalement assistée

L'évolution spectaculaire des dernières deux décennies de la recherché médicale et génétique a conduit à l'apparition d'un nouveau type de filiation, à la base de laquelle se trouve la reproduction médicalement assistée. Ayant comme point de départ le souhait des couples de devenir parents et l'infertilité de l'un d'entre eux, les chercheurs ont découvert et ont perfectionné plusieurs techniques, par l'intermédiaire desquelles, en ayant recours aux gamètes étrangers au couple, on intervient avec succès dans le miraculeux processus de la reproduction¹. Ces techniques de reproduction médicalement assistée² mettent en scène, selon le cas, un quartette, formé de la mère, du père, de l'enfant et du tiers, même un quintette, formé de la mère, du père, de l'enfant, des tiers donateurs - membres d'un autre couple - la famille traditionnelle, créée aux liaisons de sang, étant remplacée par une famille artificielle, construite à l'aide des gamètes des tiers anonymes.

Tandis que la maternité est liée au fait de la naissance, la filiation envers ce parent est sûre. En ce qui concerne la paternité, sa détermination envers l'enfant résulté par RMA est incertaine. Même si aujourd'hui il y a des moyens scientifiques, qui permettent la détermination de la vérité biologique concernant la paternité d'un enfant (tel le cas de l'expertise de l'empreinte biologique), la loi continue a préférer et à mettre à la base de la filiation, sous certaines conditions, la volonté de ceux qui souhaitent devenir parents, autrement dit, la liaison volitive et affective.

  1. Le développement de la médicine a permis autant la limitation des naissances, par contraception et par avortement, et aussi l'éradication de la stérilité masculine ou féminine, par l'application de diverses techniques de reproduction médicalement assistée

  2. Ces techniques de reproduction médicalement assistée peuvent être ainsi classifiées: l'insémination artificielle, qui permet à une femme de rester enceinte avec le sperme de son mari, de son concubin ou d'un tiers anonyme; la fécondation in vitro, qui suppose le transfert d'embryons réalisés dans le laboratoire soit avec les gamètes du couple, soit avec de gamètes étrangers (l'ovocyte d'une autre femme ou/et les spermatozoïdes d'un tiers); le "louage" de l'utérus, qui suppose l'intervention d'une "mère reproductive" ou d'une "mère de substitution". Dans la présente étude, les mentions à la reproduction médicalement assistée seront faites, brevitas causa, par l'abréviation RMA.

Les normes de droit existantes dans les législations des Etats ont été dans l'impossibilité de faire face aux situations juridiques issues de l'application des techniques de reproduction médicalement assistée, pour lesquelles le législateur n'a pas été préparé; la science et la technique, alliées même en ce qui concerne la question de la dignité de la personne physique, semblent être entrées en conflit avec les principes juridiques bien établis, comme il résulte de certaines pratiques biomédicales. C'est la raison pour laquelle, grâce à l'application des techniques dePage 45reproduction médicalement assistée et de la naissance des enfants ainsi conçus, l'intervention du législateur dans la matière de la filiation était indispensable et, en même temps, délicate, puisqu'elle a dû réaliser un compromis entre l'affirmation des règles éthiques visant la garantie du respect de la personne humaine, d'une part, et la nécessite de ne pas représenter un obstacle dans la voie du progrès scientifique, susceptible d'éradiquer une maladie, une souffrance ou un handicap, de l'autre part.

II Clarifications terminologiques concernant "la mère porteuse"

Les problèmes juridiques spéciaux apparaissent au cas de la "mère porteuse"53. Le fait de porter une gestation, à la base d'une convention entre une femme et un couple qui ne peut pas avoir d'enfants, l'accouchement de l'enfant, la renonciation à celui-ci et le transfert de l'enfant au couple qui a "commandé" la grossesse, voilà un comportement choquant pour la civilisation du XX -ème siècle et le début du XXI -ème siècle..

Il y a une diversité de mots dénommant la "mère reproductive", à savoir: " mère de substitution", surrogate mother, mère porteuse, le louage de l'utérus:

- la mère porteuse classique, celle qui accepte d'être inséminée avec la sperme du conjoint de la femme infertile, assurant la grossesse d'un enfant, qui, de point de vue génétique, est a lui, et que, après la naissance, remet au couple qui souhaite un enfant. Par conséquent, la mère porteuse pas seulement emprunte son utérus pour porter la grossesse, mais offert, en même temps, ses ovocytes aussi. Autrement dit, elle cumule le rôle de mère géniteur et celle de mère gestatoire. Ce procédé s'appelle aussi "la gestation pour autrui";

- la mère porteuse par fécondation "in vitro" est la femme, dans l'utérus de laquelle on implante un ou plusieurs embryons obtenus par la fécondation in vitro, partant des ovocytes et des spermatozoïdes du couple sollicitant. Donc, la mère porteuse "prête" seulement son utérus, elle étant seulement mère gestatoire. Dans la littérature de spécialité, on affirme que cette hypothèse représente le vrai type de "mère porteuse".

Essayant une définition, on peut affirmer que, par "mère porteuse", on comprend la femme qui accepte de porter une gestation, réalisée soit par insémination avec le sperme du conjoint de celle qui souhaite devenir mère, soit par l'implantation de l'embryon obtenu dans le laboratoire avec les gamètes du couple, à la place d'une autre femme, et donne naissance à l'enfant pour cette dernière54.Page 46

D'un point de vue biologique, la mère de l'enfant peut être: - la femme porteuse, lorsque celle-ci a été inséminée avec le sperme du conjoint de la femme qui souhaite avoir un enfant, ce qui signifie que cette dernière, même si elle accepte de porter une gestation, est infertile;

- l'épouse, lorsque celle-ci, bien qu'infertile, est inapte, de point de vue médical, de porter une grossesse, et la conception a été réalisée par fécondation in vitro de son ovule avec le sperme de son époux. L'épouse, qui souhaite devenir mère, a seulement le rôle de donateur, puisqu'elle transmet seulement les gamètes à l'aide desquels RMA se réalise. Ainsi, ne participant pas à la gestation, son intervention génétique reste sans influence sur la filiation de l'enfant.

D'un point de vue juridique, quel que soit le patrimoine génétique de l'enfant, la femme qui donne naissance devient mère et, dans notre cas, il s'agit toujours de la "mère porteuse". Autrement dit, la participation génétique à la gestation d'une femme étrangère au couple et qui donne naissance à l'enfant pour ce couple, représente un obstacle juridique à la constitution d'une autre liaison de filiation, puisqu'aucune autre femme que celle qui donne naissance ne pourrait être déclarée mère.

Ainsi, il nous apparaît comme évident que la maternité de substitution représente un moyen non naturel par l'intermédiaire duquel une femme peut devenir mère. Cette maternité de substitution n'est qu'une autre technique de reproduction médicalement assistée qui implique la participation de trois sujets55, à savoir: l'époux et l'épouse qui souhaitent devenir parents, et la femme qui accepte de porter la grossesse et donner naissance pour ce couple. Habituellement, la "mère porteuse" est le résultat d'une convention entre les deux parties, les conjoints, comme membres du couple, d'un côté, et la femme qui va porter la grossesse, de l'autre côté.

Le recours à la "mère porteuse" est fait seulement dans l'intérêt de devenir mère, de l'autre femme, non porteuse de grossesse, puisqu'elle se trouve soit dans l'impossibilité de rester enceinte, soit puisque porter la grossesse, lui est, pour des raisons médicales, totalement interdit.

III La maternité de substitution dans certaines législations européennes

1) Précisions préalables. L'interdiction de toute forme de maternité de substitution n'est pas unanime dans les pays occidentaux. Pendant que la législation des Etats comme la France, la Suisse, l'Espagne, la Suède, la Norvège, le Canada, l'Australie interdit la possibilité d'utiliser "une mère porteuse", d'autres Etats américains, où la loi prévoit l'obligation de la gratuité du contrat entre la "mèrePage 47porteuse" et le couple, laquelle prévision, dans la pratique, n'est pas toujours respectée. Au cas où un tel contrat est licite, "la mère porteuse" a les mêmes droits sur l'enfant que les donateurs, à condition d'introduire une stipulation expresse dans le contrat.

Par la suite, on s'est proposé de présenter l'évolution de la jurisprudence et de la législation de trois Etats européens dans la matière de la "mère porteuse", à savoir, la France, l'Allemagne et la Grande Bretagne.

On n'exclut pas la possibilité qu'une femme célibataire ait recours à cette technique de RMA, auquel cas l'insémination de la femme porteuse se réalise avec le sperme d'un tiers donateur, connu ou anonyme.

En France, au début, la maternité de substitution a été permise, puisque ultérieurement, la jurisprudence la considère contraire à l'ordre publique, et, finalement, par les dispositions de la Loi no. 94-654 concernant la donation et l'utilisation des éléments et produits du corps humain, la RMA et le diagnostique prénatal, à partir de 29 juillet 199456, celle-ci a été expressément interdite. La position du législateur français a été conforme à la Résolution du Parlement de l'Europe du 19 mars 1989, qui a prévu que toute forme de maternité de substitution doit être...

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